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Histoire de la frontière suisse

Tour de Suisse historique aux confins

Confédération suisse / République française

Du Mont Dolent au port de Bâle

Du Mont Dolent (tripoint Italie-France-Suisse) au port de Bâle (tripoint France-Allemagne-Suisse), la frontière franco-suisse s'étend sur 571 kilomètres, répartis à raison de 91 km pour le Valais, de 103 km pour Genève, de 146 km pour Vaud, de 62 km pour Neuchâtel, de 120 km pour le Jura, de 20 km pour Soleure, de 25 km pour Bâle-Campagne et de 5 km pour Bâle-Ville.

borne-frontière tripoint Mont Dolent France Italie Suisse
Mont Dolent
borne-frontière Tripoint à Bâle France Allemagne Suisse
Tripoint à Bâle

Du Mont Dolent au lac Léman (Valais-France)

Les 91 kilomètres de la frontière franco-suisse du Mont-Dolent au lac Léman à Saint-Gingolph sont marqués aujourd'hui par 98 bornes complétées de quelques entre-bornes. Cette frontière suit, en gros, la ligne de séparation des eaux entre le bassin direct du Rhône et celui, respectivement, de l'Arve puis des Dranses (de Morzine et d'Abondance).

borne-frontière 1738 Valais sept dizains Royaume de Sardaigne
Borne-frontière de 1738 entre le Royaume de Sardaigne et le Valais des sept dizains
Barrage d'Emosson frontière Suisse France
Barrage d'Emosson
Dent du Vélan sur la frontière franco-suisse
Dent du Vélan sur la frontière franco-suisse

Les bornes encore visibles sur la limite couvrent grosso modo la période des cinq cents dernières années. La frontière possède une histoire encore plus longue. De la Morge de Saint-Gingolph, séparant probablement des tribus celtes, en passant par les abbayes et prieurés ayant modelés la limite sur les crêtes tout comme les bagarres incessantes entre la Savoie et le Valais, le territoire valaisan prendra finalement sa forme actuelle en 1569. Face à cet État du Valais, le duché de Savoie puis le Royaume de Sardaigne laissèrent finalement la place, en 1860, à la France entre le Mont Dolent et le lac Léman.

De chaque époque il reste, un tracé, des toponymes, des pierres, des bornes ou des rochers taillés pour illustrer l'histoire de la délimitation internationale. Morgins, la Morge, la Pierre des Limites, les croix de Savoie, les écus valaisans des sept dizains comme des treize districts, les armes de l'évêque de Sion comme celles de l'abbé de Saint-Maurice jalonnent encore la ligne de délimitation complétées par moult bornes aux inscriptions plus modestes. Le tout dans des paysages grandioses où les montagnes et les torrents jouent, eux aussi, le rôle de bornes naturelles.

D'Hermance au Moulin de Grilly (Genève-France)

La frontière franco-suisse du canton de Genève est assez particulière dans le sens où elle ne s'appuie pas sur des hauteurs naturelles comme la crête des Alpes ou celle du Jura. Les 103 kilomètres de la délimitation internationale se trouvent en plaine et sur le lac. Cette situation singulière a rendu nécessaire la pose de très nombreuses bornes-frontière (445 bornes).

borne-frontière 1816 Genève Royaume de Sardaigne
Borne-frontière de 1816 entre le canton de Genève et le Royaume de Sardaigne
Frontière à Hermance
Hermance
Frontière France Suisse ancienne douane de Chevrens
Ancienne douane de Chevrens

Le territoire genevois actuel découle des traités de Vienne et de Paris de 1814 et 1815. Genève rejoignit la Confédération suisse en 1815 comme vingt-deuxième canton avec un territoire un peu étoffé pour lui permettre d'avoir une liaison avec la Suisse (région de Versoix) et une continuité territoriale entre ses possessions historiques. La frontière internationale genevoise bordait alors deux États : à l'est et au sud, le Royaume de Sardaigne, à l'ouest le Royaume de France. En 1860, la Savoie plébiscita son rattachement à la France. La frontière internationale devint ainsi uniquement franco-genevoise. Le développement de l'urbanisation entrainera, au cours du XXe siècle, quelques adaptations mineures de la limite. Les aigles sardes et genevois ainsi que les lys royaux de France (Restauration) agrémentent encore quelques pierres historiques sur la limite et parfois même en dehors de celle-ci. Cheminer le long du tracé de la frontière du canton est une découverte historico-pédestre étonnante.

Du Vitiau au moulin de Grilly (Vaud-France)

Une frontière lacustre et une jurassienne : voilà ce qui compose la délimitation internationale du canton de Vaud. Si le lac n'est pas propice à la pose de bornes, le Jura s'est révélé, par contre, favorable à leur plantation et surtout à leur conservation. 309 bornes et quelques entre-bornes, couvrant plus de cinq cents ans d'histoire, jalonnent les 91 kilomètres de frontière terrestre du canton de Vaud avec la France.

borne-frontière 1553 tripoint Vaud Neuchâtel France
Borne-frontière du pré Vitiau de 1553 tripoint Vaud Neuchâtel France Promenade n°1
Piagrette Frontière Vaud France
Piagrette
Pont de Grilly frontière Vaud France
Pont de Grilly

Le pays de Vaud fut tour à tour helvète, romain, burgonde bourguignon, savoyard, bernois, helvétique puis finalement canton suisse depuis 1803. En outre, le tracé de la frontière sur les crêtes jurassiennes fut fortement influencé par l'établissement de plusieurs prieurés et abbayes dans la région à partir de l'an Mil. Cependant, ce sont les bernois, arrivés en 1536 dans le pays de Vaud, qui systématisèrent le marquage des frontières aux moyens de bornes. Tout d'abord au nord, à Sainte-Croix en 1553, puis au sud, dans la région de Versoix en 1564 suite au traité de Lausanne. Les deux extrémités du pays seront reliées par un abornement continu dès 1649. Berne bordait alors la Franche-Comté espagnole. De magnifiques bornes de cette époque, blasonnées du lion et de l'ours, subsistent encore dans les forêts jurassiennes. La Franche-Comté deviendra française en 1678 sous Louis XIV. Quelques bornes aux trois lys illustrent ce changement. En 1798, le pays de Vaud se libéra et adhéra à la République helvétique une et indivisible. Des bornes à l'acronyme RHUI rappellent cette période de l'histoire suisse. En 1803, Vaud devint un canton à part entière. L'écu vert et blanc « Liberté et Patrie » orne, depuis lors, les pierres de 1824 en compagnie du lys de la restauration monarchique française. Une dernière page d'importance pour la frontière franco-suisse se tourna dans la vallée des Dappes au milieu du XIXe siècle. La France de Napoléon III désirait intégrer au territoire français la totalité du tracé de la route stratégique du col de la Faucille. Ce qu'on appela alors l' « affaire des Dappes » déboucha en 1862 sur un traité d'échange de territoire entre la Confédération suisse et l'Empire français. Les bornes à l'aigle impérial et à l'écu vaudois dans la région de la Cure illustrent, in situ, les implications de ce traité.

À partir de la fin du XIXe siècle, la Suisse figurera en lieu et place du canton sur la face vaudoise des bornes-frontière. La découverte inédite du Jura vaudois à travers le prisme de ses bornes-frontière ne laisse indifférent ni les amateurs de nature ni les fans d'histoire.

De Biaufond au Vitiau (Neuchâtel-France)

Le comté de Neuchâtel, devenu principauté puis canton suisse, possède une longue histoire que les bornes des hauteurs jurassiennes illustrent à leur manière. Dès 1408, le Doubs fut choisi pour limite entre la Bourgogne et le comté de Valangin (qui rejoindra le comté de Neuchâtel en 1592) de Biaufond au lac des Brenets. Cette partie de frontière ne bougera plus. Les confédérés occupèrent le comté de 1512 à 1529, mettant de l'ordre dans les délimitations de celui-ci. Entre 1524 et 1527, le tracé de la frontière des Brenets au Vitiau à Sainte-Croix fut finalisé et aborné avec le pal aux trois chevrons et la croix de Bourgogne avec briquets comme blasons. Cet abornement fut confirmé et complété en 1704 et 1766 par le Royaume de France présent aux frontières de Neuchâtel depuis 1678. En 1707, le roi de Prusse devint prince de Neuchâtel et de Valangin. La principauté prussienne réalisa en 1766, avec la France, l'abornement systématique de leur limite commune dont il reste encore plusieurs témoins intacts (blasons : chevrons/trois lys). Les bouleversements politiques enfantés par la Révolution française de 1789 toucheront Neuchâtel quelques années plus tard, durant la période napoléonienne. De 1806 à 1814, Berthier, Maréchal d'Empire, régna sur la principauté. Suite à la chute de Napoléon, les traités de Vienne et de Paris redessinèrent la carte de l'Europe. Neuchâtel devint officiellement, en mai 1815, le vingt-et-unième canton de la Confédération tout en restant (ou en redevenant) une principauté prussienne. Question territoire, le nouveau canton s'agrandit de la commune du Cerneux-Péquignot. Toute la frontière franco-neuchâteloise, de Biaufond au Vitiau, fut révisée, adaptée (au Cerneux-Péquignot) et abornée plus densément en 1819. Les nouvelles bornes portaient le pal chargé de chevrons neuchâtelois et le lys de la restauration française. Un grand nombre de ces pierres subsistent le long de la frontière

borne-frontière de 1766 Neuchâtel France
Borne aux chevrons de la principauté de Neuchâtel 1766
Doubs frontière entre Neuchâtel et la France
Doubs entre Neuchâtel et la France
Frontière Col des Roches au Locle
Col des Roches au Locle

Le dernier acte, en 1848, sans conséquence sur le tracé de la limite, toucha les drapeaux des États limitrophes. Depuis lors, de part et d'autre du Doubs, flotte des drapeaux tricolores : bleu-blanc-rouge pour la France, vert-blanc-rouge avec la croix suisse pour Neuchâtel. Seule une borne aux Brenets illustre ce changement. Les 182 bornes placées entre rivière et montagne le long de 62 kilomètres de magnifiques paysages jurassiens livrent leur histoire page par page.

De Pleigne à Biaufond (Jura-France)

La frontière franco-jurassienne est à la fois la plus neuve de Suisse dans sa dénomination et la plus densément abornée. En effet, le Jura est devenu un canton suisse en 1979 et sa frontière avec la France, longue de 121 km comporte pas moins de 606 bornes standard et de nombreuses entrebornes.

borne-frontière Evêché de Bâle France
Borne à la crosse de l'Evêché de Bâle
borne-frontière n° 215 Suisse (Jura) France
Borne-frontière n°215 à Boncourt
Frontière à Bure entre le Jura et la France
Frontière à Bure entre le Jura et la France

L'histoire de la limite se confond avec celle de la formation de l'Evêché de Bâle. Par Evêché de Bâle, on entend les terres placées sous l'autorité temporelle de l'Evêque de Bâle (Principauté épiscopale de Bâle). Après la Réforme à Bâle, Porrentruy devient, en 1529, la capitale de la principauté. Son territoire comprend le canton du Jura actuel, le Jura bernois, Laufon et Birseck. La limite aujourd'hui franco-jurassienne se met en place au cours du XVIIIe siècle et trouve pratiquement son tracé actuel suite au traité d'alliance et la convention de 1780 entre le Roi de France et le Prince Evêque de Bâle. En 1815 au Congrès de Vienne, les puissances décident de réunir l'Evêché de Bâle (sans Birseck) au canton de Berne. Dès lors les commissaires franco-suisses jalonnent en 1817 l'ancienne frontière de 1780 d'un lys de la Restauration du côté de la France et d'un ours bernois du côté de la Suisse. En 1979, date d'entrée du canton du Jura dans la Confédération suisse, la frontière (sans Laufon) devient franco-jurassienne.

Du Petit-Lucelle au Rhin à Bâle (Bâle-Campagne/Soleure/Bâle-France)

borne-frontière Evêché de Bâle France
Borne à la crosse de l'Evêché de Bâle
borne-frontière n° 215 Suisse (Jura) France
Borne-frontière n°215 à Boncourt
Frontière à Bure entre le Jura et la France
Frontière à Bure entre le Jura et la France

L'histoire de la limite se confond avec celle de la formation de l'Evêché de Bâle. Par Evêché de Bâle, on entend les terres placées sous l'autorité temporelle de l'Evêque de Bâle (Principauté épiscopale de Bâle). Après la Réforme à Bâle, Porrentruy devient, en 1529, la capitale de la principauté. Son territoire comprend le canton du Jura actuel, le Jura bernois, Laufon et Birseck. La limite aujourd'hui franco-jurassienne se met en place au cours du XVIIIe siècle et trouve pratiquement son tracé actuel suite au traité d'alliance et la convention de 1780 entre le Roi de France et le Prince Evêque de Bâle. En 1815 au Congrès de Vienne, les puissances décident de réunir l'Evêché de Bâle (sans Birseck) au canton de Berne. Dès lors les commissaires franco-suisses jalonnent en 1817 l'ancienne frontière de 1780 d'un lys de la Restauration du côté de la France et d'un ours bernois du côté de la Suisse. En 1979, date d'entrée du canton du Jura dans la Confédération suisse, la frontière (sans Laufon) devient franco-jurassienne.

Confédération suisse / République fédérale d'Allemagne

De Bâle à Thal (SG)

Confédération suisse / République d'Autriche

De Thal (SG) au Piz Lad

Confédération suisse / République italienne

Du Piz Lad au Mont Dolent

Du Piz Lad (tripoint Autriche-Italie-Suisse) au Mont Dolent (tripoint Italie-France-Suisse), la frontière italo-suisse s'étend sur 741 kilomètres, réparti à raison de 201 km pour le Valais, de 207 km pour le Tessin et de 333 km pour les Grisons.

Mont Dolent Tripoint frontière Suisse Italie France
Borne sur fond de Mont Dolent
Borne-frontière n° 9 Valais et Italie Grand-Saint-Bernard
Borne au Grand-Saint-Bernard
Massif du Mont Rose
Massif du Mont Rose

Du Piz Lad au Sasso Bodengo (Grisons - Italie)

La frontière entre les Grisons et l'Italie est une frontière internationale relativement jeune. Jusqu'en 1797 la Valteline, Bormio et Chiavenna faisaient parties des pays sujets des trois Ligues (Grisons). Du côté italien, l'unité du pays ne s'est réalisée qu'en 1861. A l'issue de la première guerre mondiale, le Tyrol du Sud est rattaché à l'Italie. Depuis lors, la frontière italo-grisonne s'étend du Piz Lad (tripoint Suisse-Autriche-Italie) au Sasso Bodengo où se rejoignent les Grisons, le Tessin et l'Italie.

Du Sasso Bodengo au Piccolo Corno Gries (Tessin - Italie)

La frontière entre le canton du Tessin et l'Italie s'étend sur 207 km par monts et par vaux.

Du Piccolo Corno Gries au Mont Dolent (Valais-Italie)

Les 201 kilomètres de la frontière italo-suisse du Mont-Dolent au Piccolo Corno Gries sont marqués aujourd'hui par 93 bornes complétées de quelques anciennes pierres. La frontière internationale suit en général la ligne de séparation des eaux du bassin versant du Rhône. Cependant, elle s'en éloigne au col du Grand-Saint-Bernard et dans la région du Simplon (Zwischbergen, Simplon Dorf et Gondo).

borne-frontière historique du 16e siècle Italie-Valais
Borne-frontière du XVI siècle au Grand-Saint-Bernard
borne-frontière historique de 1755 Italie-Valais
Borne historique de 1755 au Grand-Saint-Bernard

Les bornes de la limite italo-suisse encore en place aujourd'hui datent majoritairement du vingtième siècle. Cependant, la ligne de démarcation plonge ses racines probablement dans les limites provinciales romaines. Façonnée ensuite par la construction et l'extension de l'État valaisan ainsi que par les migrations des Walser, la frontière se stabilise au cours du XVIe siècle dans les grandes lignes sur le tracé que nous lui connaissons aujourd'hui. En face de l'État du Valais, le duché de Savoie puis le Royaume de Sardaigne laissent finalement la place, en 1860, à la France entre le lac Léman et le Mont Dolent et au Royaume d'Italie (puis la République italienne) entre ce dernier sommet et le Piccolo Corno Gries. Plus récemment, au XXe et XXIe siècle, c'est le développement de l'industrie du tourisme et la fonte des glaciers qui rendent nécessaire la pose de nouvelles marques de délimitation en plusieurs endroits.

Chaque époque nous lègue un témoignage sur la limite. À travers les tracés, les toponymes, les pierres gravées, les bornes ou les inscriptions sur les rochers taillés, l'histoire de cette délimitation internationale se découvre en chemin. En effet, le Saint-Bernard et le Simplon comme les cols plus retirés, les croix de Savoie et les écus valaisans des sept dizains comme les inscriptions plus modernes, tous concourent à s'imbriquer dans le puzzle historique de la formation de ce morceau de frontière internationale aujourd'hui italo-suisse. Le cadre naturel grandiose qui porte la limite internationale du Valais ajoute à cette découverte majesté et grand air.